Commencée il y a plus d’un an, la guerre en Ukraine a permis de remettre en lumière les tensions diplomatiques internationales. La crise a poussé de nombreux pays à prendre parti : condamner l’invasion, soutenir la Russie ou rester neutre. Cette troisième voie semble de plus en plus difficile à tenir pour la Chine, qui est forcée de faire un grand écart politique.
La Russie : un allié historique de la Chine
La République Populaire de Chine est née le 1er octobre 1949, à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale. Son idéologie communiste la pousse naturellement à conclure un pacte d’alliance avec l’URSS le 14 février 1950.
Cependant, dès 1955, elle déclare une politique de non-alignement à la Conférence de Bandung en Indonésie. Celle-ci réunit de nombreux dirigeants de pays du Tiers-monde souhaitant sortir de la logique des “blocs” capitaliste et communiste. Zhou Enlai, premier ministre chinois de l’époque, présente la Chine comme leader du groupe.
Toutefois, d’un autre côté, le pays participe directement à des conflits ouverts contre les Etats-Unis, comme en Corée ou au Vietnam. On comprend que la Chine joue un double-jeu, en se déclarant non-alignée tout en soutenant le bloc communiste. Elle rompt cette alliance en 1963.
En effet, la Chine souhaite s’émanciper de l’URSS. Du fait de traités inégaux, Mao Zedong la rapproche des colonisateurs européens du XIXème siècle. Des querelles territoriales autour de la région du Kamtchakta sont aussi en jeu. Staline refuse également d’accorder à son allié l’arme atomique et un partage de la maitrise du mouvement communiste international. Cette rupture historique montre que des divisions séparent les deux géants depuis la Guerre Froide.
Et aujourd’hui ?
La situation n’est évidemment plus la même. La Chine entretient de solides relations avec les occidentaux. Cela l’oblige à ne pas soutenir officiellement la Russie. Le mot d’ordre du Parti reste la paix. Ainsi, le ministère des affaires étrangères chinois incite les belligérants au calme dans ses “douze points”, publiés à l’occasion de la première année du conflit. Pour autant, il ne dénonce pas les actions des russes.
Les Douze Points
Les Douze Points invitent tout d’abord les deux parties à cesser les hostilités, à protéger les civils et à régler la crise humanitaire. De plus, le ministère insiste sur la nécessité de respecter le principe de souveraineté. Cette déclaration est une pique que l’on pourrait cependant juger hypocrite, étant donné les revendications de Pékin en mer de Chine méridionale et sur Taïwan. La Chine s’oppose également à “la mentalité de la Guerre Froide”, renouant avec son héritage de leader des non-alignés. Ce point est plutôt dirigé à l’encontre de l’OTAN et surtout des Etats-Unis, avec lesquels ses relations ne cessent de se dégrader.
Le communiqué sert aussi à défendre les intérêts de la Chine. Il réclame la sécurisation des exportations ukrainiennes céréalières. Ses achats d’orge et de blé ont ainsi triplé entre 2012 et 2021, ce qui est révélateur de sa dépendance. Les prix de blé et du maïs ayant augmenté de plus de 40% depuis le début de la guerre, réduire le coût des denrées agricoles est devenu une priorité. L’attention est particulièrement portée sur le maïs : en 2019, un tiers des importations chinoises provenaient de l’Ukraine.
Un changement de politique
Cette neutralité affichée depuis le début du conflit pourrait néanmoins bien changer. Ainsi, en février 2023, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a révélé à la BBC que selon les renseignements américains, certaines entreprises chinoises songeraient à vendre des armes et munitions à la Russie. Les usines chinoises ne fournissaient jusqu’à présent que des gilets pare-balles. Ce changement de politique est jugé préoccupant par l’Occident, car il pourrait allonger le conflit et augmenter les tensions dans le Pacifique.
Si une aide militaire chinoise demeure toujours improbable, un rapprochement économique est cependant bien réel. En effet, les échanges commerciaux sino-russes ont augmenté de 34% en 2022. Une entrevue entre Xi Jinping et Vladimir Poutine, du 20 au 24 mars dernier, a également appuyé ce rapprochement. Leur relation atteindrait même “le point culminant de leur histoire”, selon le président russe, plaçant leur rapprochement au-dessus de celui “des temps de la Guerre Froide”.
Une amitié surprenante pour une Chine qui se veut pourtant neutre. Malgré cela, la crainte pour la Chine de perdre ses clients européens et celle pour la Russie de voir l’influence chinoise grandir en Sibérie demeurent des obstacles de taille à cette “alliance”. Si vous voulez plus d’information sur la rencontre, allez voir cet article de France 24.
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