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Préserver un patrimoine classique littéraire et culturel important
Rejouer des pièces de théâtre classées parmi les « chefs d’œuvres dramatiques français » est d’abord une façon de conserver un patrimoine littéraire représentatif de notre nation. Cela permet d’éviter qu’ils ne tombent dans l’oubli, alors qu’ils ont contribué au rayonnement culturel de la France de leur temps et restent toujours des marqueurs du talent français.
Faire (re)vivre les chefs d’oeuvres classiques du passé
Au-delà du simple fait de conserver des œuvres anciennes, cela permet de les dépoussiérer, de les faire revivre.
Il est beaucoup plus attrayant de voir jouer une pièce que de la lire. Pourquoi ? Parce que la mise en scène aide à faire passer un langage d’une autre époque, qui peut rendre la lecture pénible quand on est tout seul face au livre, d’autant plus si le metteur en scène choisit de transposer la pièce au XXIe siècle. Les œuvres de Molière, Racine et Corneille apparaissent tout de suite plus accessibles.
Parce que la mise en scène dynamise les mots : elle leur donne une troisième dimension qui permet de mieux se représenter les personnages, le décor, les gestes, les mimiques, les intonations. Mais aussi parce qu’il peut y avoir de l’interaction entre les acteurs et le public faisant alors sauter le fameux « quatrième mur ».
Mettre en scène un classique le rend « vivant ».
Cela permet de toucher davantage le public par des émotions et sentiments restitués par des êtres vivants que le papier et les mots ne peuvent entièrement retranscrire. Ainsi, le comique d’un personnage est mis en relief, comme l’avarice d’Harpagon rendu hilarant par Louis de Funès.
A l’inverse, le déchirement du héros tragique racinien apparaît plus émouvant lorsque Phèdre est joué à la Comédie Française.
L’on ne s’imagine plus mais l’on vit l’intensité, la tension dramatique au moment de la révélation de ses sentiments à Hippolyte. Il n’y a plus la distance imposée par le papier : l’on est plongé, immergé dans la pièce, ce qui permet de « voir » mais aussi de « ressentir » plus intensément.
Transmettre des thèmes toujours actuels et des messages intemporels
Certaines pièces étaient en outre engagées en leur temps et le restent, car porteuses de messages universels et intemporels. C’est le cas avec de nombreuses pièces de Molière.
La satire des médecins et le caractère hypocondriaque d’Argan dans Le Malade Imaginaire renvoient aux balbutiements de la médecine moderne au XVIIe siècle, où l’on trouvait encore beaucoup de charlatans, à la méfiance des croyants pour ce qui relevait de la science, la question de la Nature VS la culture.
Toutefois, cette pièce fait écho au scientisme du XXIe siècle, où la Science a commencé à devenir dogmatique et s’ériger en remède indispensable, à la peur inconsciente collective de la maladie dans un siècle où tout est aseptisé, médicamenté, et où les vaccins prolifèrent. L’on peut rire du ridicule d’Argan, mais nous sommes nombreux a avoir réagi à sa façon lors de l’arrivée du Covid 19, avant d’apprendre à vivre avec.
La question du pouvoir et de la fiabilité de la Science est toujours d’actualité, encore plus au XXIe siècle où ses dérives sont plus nombreuses par le développement de la technologie.
La question de l’émancipation de la femme essentielle à l’œuvre moliéresque fait écho à la sensibilité actuelle pour les questions de parité de genres et d’égalité hommes-femmes. Les servantes de Dorinne dans Le Tartuffe, en passant par Claudine dans George Dandin, à Toinette dans Le Malade Imaginaire, montrent que les femmes ont un rôle à jouer dans la société, qu’elles ont un pouvoir d’action sur le monde pour l’améliorer, grâce à leur intelligence, à leur subtilité d’analyse, et à leur propre sensibilité.
Les classiques de Molière ne sont toutefois pas les seuls à porter des thèmes valables de tout temps. C’est aussi le cas chez Beaumarchais et Voltaire au XVIIIe siècle, ou encore Hugo au XIXe.
Le monologue de Figaro dans Le Mariage de Figaro renvoie à notre fibre libérale, notre mentalité de « self-made man » dans notre société libérale capitaliste, notre attachement au mérite et au principe d’égalité, qui nous sont chers.
La pièce Mahomet sur le prophète éponyme de Voltaire, traitant des dérives du fanatisme et de la croyance aveugle, résonne particulièrement à l’ère du terrorisme, du djihadisme et des attentats d’intégristes musulmans. Plus de deux cent ans après, l’intolérance et le détournement de la religion à des fins personnelles de pouvoir et d’ambition, sont toujours ancrés dans nos sociétés. On prend conscience que malgré le passage des siècles, les hommes et les sociétés ne changent pas tant que ça.
Enfin, la diatribe de Ruy Blas sur l’affaissement de l’État dans la pièce homonyme d’Hugo n’est pas sans rappeler la déliquescence de l’État français actuel, la dérive vers l’anarchie, l’abus d’autocrates au sein des gouvernements qui font passer leurs intérêts avant ceux de la nation et la corruption de l’autorité par le haut de la pyramide.
Redonner un nouveau souffle aux pièces classiques
Une interprétation contemporaine réactualise la pièce et renouvelle son intérêt, en abolissant la distance temporelle entre l’auteur et le public.
La réécriture de l‘Antigone de Sophocle par Jean Anouilh en 1944, par exemple, a ouvert des perspectives d’interprétation, comme en atteste la mise en scène de Nicolas Briançon en 2003, donnant un point de vue plus moderne sur l’opposition entre la légalité et la légitimité, le devoir, le droit et la loi.
Conclusion
Ainsi, réinterpréter des pièces du grand répertoire français est un moyen efficace de faire perdurer leur mémoire et d’instruire le public contemporain, en évitant l’aspect fastidieux et rébarbatif d’une simple étude de texte. Cela permet de réunir petits et grands autour de ce qui fait la force de notre culture. C’est une excellente manière de retenir les classiques, comme le cerveau enregistre 30% de ce qu’il voit contre 10% de ce qu’il lit.
Liens vers les pièces mentionnées, disponibles en français moderne :
Théâtre Classique : édition de LE MALADE IMAGINAIRE (MOLIERE) (theatre-classique.fr)
Le monologue de Figaro | BNF ESSENTIELS
LE FANATISME, TRAGÉDIE. (theatre-classique.fr)
Autre article dans la même thématique : https://blog.workyt.fr/culture-lecture-george-dandin-une-piece-toujours-actuelle/
NB : si vous êtes étudiant avec un petit budget, renseignez-vous car de plus en plus de festivals culturels, à l’échelle locale notamment, sont gratuits. En outre, le Pass Culture de 300 euros pour les 15-18 ans inclus (valable 2 ans à compter de la date de souscription, soit jusqu’à 20 ans si vous avez souscrit à 18 ans) permet l’accessibilité à des offres de spectacles de proximité. Enfin pensez à vous informer sur une aide régionale à disposition des jeunes, car certaines régions (les Pays-de-la-Loire, par exemple) aident les lycéens-étudiants à avoir accès à la culture par une certaine somme, sous réserve de certaines conditions d’âge.
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