Cet article permet de comprendre le fonctionnement particulier du chinois mandarin. Pour en savoir plus sur l’expansion internationale de cette langue nous vous recommandons de lire également cet article spécialisé sur le sujet.
Une langue difficile à écrire : les sinogrammes
Grammaticalement, le chinois mandarin pourrait être considéré comme simple. En effet, la conjugaison, les temps et les accords n’existent pas. Cependant, en ce qui concerne l’écriture, le mandarin est au contraire l’une des langues les plus complexes au monde.
En effet, la langue ne peut être retranscrite à l’écrit qu’avec des caractères nommés sinogrammes. On estime le nombre total à 40 000, voire 80 000 sinogrammes. Le langage courant en mobilise en moyenne 5000 .
Ces idéogrammes sont totalement éloignés des formes de notre alphabet romain, et ressemblent davantage à des sortes de dessins. Ils ont en effet été inventés à partir de représentations graphiques.
À l’heure actuelle, les Chinois continuent à utiliser les sinogrammes, dans une version légèrement simplifiée depuis 1966 et la Révolution Culturelle. La version traditionnelle est toujours utilisée à Taïwan, et parfois à Hong-Kong également. Aucune écriture avec un alphabet romain proche du nôtre ne permet de remplacer ces caractères, dont la précision requise pour l’écriture manuscrite est telle qu’un ordre des traits spécifique à chaque sinogramme existe et doit être respecté, au risque de le déformer, et le vider de son sens.
Exemple d’une table de sinogrammes (caractères chinois à l’écrit).
© Learn Chinese Characters Academy
Une première tentative de romanisation du chinois écrit a effectivement vu le jour en 1958, le pinyin (拼音).
Bien qu’utilisant notre alphabet romain, cette nouvelle version romanisée ne dépasse pas le cadre de l’enseignement, et ne sert qu’à faciliter l’apprentissage de la prononciation et des sinogrammes, dans le but de les mémoriser plus facilement. Elle ne peut en aucun cas se substituer à l’écriture des caractères chinois originels.
Ce nouveau système n’est d’ailleurs majoritaire qu’en Chine. À Taïwan, les élèves continuent à apprendre la langue chinoise à l’aide de l’ancien système Zhuyin, utilisant d’autres types de caractères (Bopomofo) pour représenter la prononciation des sinogrammes.
Sinogramme (à gauche) accompagné de sa transcription en Zhuyin (symboles
sur la première ligne) et en Pinyin (transcription romanisée sur la seconde ligne)
© Sing and Learn Chinese
Une langue écrite imprécise
Si le français et l’anglais sont utilisés dans la diplomatie et la rédaction de contrats pour leur extrême précision, le chinois mandarin ne peut pas se permettre une telle valorisation, tant la précision de son langage écrit est faible.
Depuis la révolution culturelle et la simplification de langue écrite, de nombreux sinogrammes ont été fusionnés, créant alors une situation rare : certains sinogrammes, y compris ceux couramment utilisés, possèdent plusieurs sens différents et prononciations distinctes en fonction du contexte dans lequel ils sont employés.
Si au moment de la rédaction, le rédacteur attribue de manière logique le sens souhaité au sinogramme, c’est au moment de la lecture que la situation se complexifie. En effet, le sens du sinogramme est libre à l’interprétation du lecteur, dans la mesure où il demeure cohérent au reste de la phrase.
Il semble alors difficile, au vu de cette situation, d’accorder au chinois le statut de langue précise.
Par exemple : 还 signifie à la fois “encore” (se prononce alors “hai”) mais aussi “rendre/retourner” (et se prononce alors “huan”). L’ordre des mots dans la phrase devient alors le seul moyen de déterminer le sens qui a été attribué au sinogramme. 我要还书 signifie “Je dois rendre un/des livre(s)”, là encore la faible précision du chinois ne nous permet pas de déterminer dans cette phrase s’il est question d’un ou plusieurs livres pour une raison d’absence d’article, tandis que 我还要书 signifie “Je veux encore un/des livre(s)”.
Mais cette imprécision ne date pas de la révolution culturelle, même si cette dernière l’a amplifiée.
Il est arrivé au cours des époques et des dynasties, que les sinogrammes aient été amenés à changer considérablement de sens (gagnant parfois des sens totalement opposés), responsables notamment de la lecture difficile des textes anciens chinois et des nombreuses théories et débats sur leur interprétation.
À titre d’exemple, 只是 (zhi’shi) est aujourd’hui utilisé pour exprimer la concession, alors que sous la dynastie Tang, il pouvait servir à exprimer la cause. Cela crée alors des interprétations contraires, ne sachant pas si le sujet devrait systématiquement se porter négativement (concession), ou s’il peut porter, à l’inverse, une connotation positive (cause).
Une prononciation orale complexe et risquée : la règle des tons
Le chinois mandarin est basé sur une échelle cinq tons. Ces tons correspondent chacun à une intonation différente de la voix. En chinois, chaque syllabe existe ainsi en cinq tons différents, et chacun de ces tons désigne un mot et un sinogramme là-encore différent.
Grille des différents tons en chinois
© Beijing Cursus
Une très légère erreur dans l’intonation donnée provoque une erreur de ton, pouvant alors faire basculer tout le sens d’un mot et d’une phrase.
Par exemple, “媳妇” signifie “belle-fille” et se prononce “xí fù”, mais “西服” signifie “costume” et se prononce “xī fú”.
Un léger écart de prononciation peut alors créer facilement une situation cocasse, transformant une phrase comme “J’aime ton costume” en “J’aime ta belle-fille”.
Un vocabulaire limité
De nombreux termes scientifiques dérivés du latin n’ont tout simplement aucune traduction ou équivalence en chinois mandarin, ce dernier ne reposant pas sur des bases latines, et ne disposant pas d’un alphabet romain.
Les traductions de termes à origine latine en chinois ne peuvent alors se faire que phonétiquement, en dépit de toute valeur étymologique, entraînant alors des pertes de précision, voire des confusions dans le cas de termes médicaux ou scientifiques à la prononciation proche les uns des autres.
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