Affiche de la 50e édition des César, la cérémonie 2025

Une cérémonie des César 2025 décevante ? Résumé et analyse des gagnants

Affiche de la cérémonie des César 2025, 50e édition
Affiche de la 50e édition des César, la cérémonie 2025

La cérémonie des César 2025, organisée par l’Académie des arts et techniques du cinéma, se déroulait à l’Olympia de Paris le vendredi 28 février : en clair et en direct sur Canal+, le tapis rouge également en live sur TikTok avec Laurie Cholewa et Léna Situations. La 50ᵉ édition des César a été présidée par l’actrice emblématique Catherine Deneuve, avec une mise en scène assurée par le réalisateur Cédric Klapisch à qui l’on doit «L’Auberge espagnole», «Les poupées russes» ou encore «En Corps» (oui, c’est un jeu de mots). Après un sketch de Jean-Pascal Zadi, la présidente de cette cérémonie, Catherine Deneuve, entame un discours et dédie cette 50e cérémonie à l’Ukraine.

Une soirée décevante ?

La soirée a été ponctuée de moments divertissants, comme les deux interventions de danse qui ont permis de présenter la récompense des meilleurs costumes et de la révélation féminine de l’année, ainsi que quelques instants comiques, notamment avec les interventions de Jean-Pascal Zadi ou encore le «César des oubliés» décerné à Franck Dubosc. Toutefois, la bonne humeur n’a pas toujours été au rendez-vous, peut-être pour refléter l’état du monde actuel. Les discours étaient en grande partie très classiques, avec les éternelles questions philosophiques des César («Mais qu’est-ce qu’un film ?», «Qu’est-ce que cela veut dire ‘meilleure actrice’ ?», etc.), ainsi que des rappels à la fragilité politique de certains pays étrangers. Ces moments peuvent être perçus comme une forme de prise de conscience collective, comme le discours de Gilles Perret sur la lutte contre les extrêmes. Mais cela n’a peut-être pas permis au public de se détacher de la réalité pour vivre pleinement un moment de pur divertissement.

Le rythme de la soirée a été ponctué de plusieurs hommages à de grandes figures du cinéma récemment disparues, dont un a été rythmé par un mini-concert de Pomme et d’Aliocha Schneider, ainsi que la remise des César d’honneur à Costa-Gavras et Julia Roberts. Ces moments se sont peut-être éternisés un peu plus que d’autres remises de prix, où les lauréats disposent d’un temps plus limité pour leurs discours (avec une petite musique sympathique pour gentiment leur signaler qu’il est temps de quitter la scène). Si le temps était à la nostalgie, il aurait été pertinent d’ajouter un montage d’extraits des moments forts de toutes les cérémonies des César, pour marquer cette 50e édition.

En fin de compte, la soirée s’est révélée assez plate. La cerise sur le gâteau a été, malgré tout, une remise de prix qui n’a pas fait l’unanimité, comme en témoigne la vague de réactions négatives sur les réseaux sociaux, et la déception que j’ai moi-même ressentie. Certains prix, que je pensais évidents et destinés à des personnes bien précises, ont été attribués à des lauréats auxquels je n’avais même pas pensé. Enfin, un petit clin d’œil particulier aux noms écorchés comme par exemple notre ministre de la Culture, Rachida Dati, qui s’est trompée en évoquant «Michel Audiard», ou encore «Jean-Patrick Zadi» appelé sur scène… Des petites erreurs sur le tapis rouge ont pu être remarquées, la cérémonie ne semblait pas pleinement contrôlée.

Qui vote pour les César ?

Les films en compétition sont élus par l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma, plus connue sous le nom d’Académie des César. Le vote se fait en deux tours et de manière électronique, impliquant près de 5 000 membres de la profession, tels que des réalisateurs, des monteurs ou des compositeurs. Une minorité de ces membres appartiennent également au secteur de l’exploitation, comprenant des distributeurs et des attachés de presse.

Nominations révélées le 29 janvier 2025 :

Récompenses dans l’ordre de la cérémonie 

Meilleure révélation masculine

La récompense a été attribuée à Abou Sangaré pour la profondeur émotive de son jeu dans «L’histoire de Souleymane». Ce film propose une immersion dans les 48 heures de la vie d’un jeune guinéen livreur à vélo à Paris, sur le point de se présenter devant l’OFPRA pour son audition dans le cadre de sa demande d’asile. Souvenez-vous de ce synopsis, il servira peut-être encore pour la suite de cet article… Abou Sangaré n’était pas un acteur professionnel dont l’histoire a inspiré le scénario du film, renforçant ainsi l’authenticité de l’histoire. La scène finale, celle de son audition, résonne d’une intensité émotionnelle qu’elle justifie à elle seule la remise de ce César. À noter qu’Abou Sangaré avait déjà été couronné du prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes 2024. Une petite pensée à Malik Frikah («L’amour ouf») et Pierre Lotin («En Fanfare»), deux talents qui, sans nul doute, auraient pu mériter cette distinction et qui, à leur manière, ont eux aussi offert des performances remarquables cette année.

Meilleur court-métrage de fiction

Le César a été attribué à «L’homme qui ne se taisait pas» de Nebojša Slijepčević qui raconte le massacre de Štrpci, survenu en 1993, où 24 musulmans bosniaques furent froidement tués dans un train par le groupe paramilitaire serbe des Aigles blancs. Ce court-métrage, huis clos dans le train avec quelques personnages, nous enferme dans cette dure réalité historique et nous rappelle que la discrimination des musulmans est toujours d’actualité.

Meilleure adaptation

Le prix a été décerné à Jacques Audiard pour son film «Emilia Pérez», adapté du roman Écoute de Boris Razon. Cette distinction marque déjà une première défaite pour “Le Comte de Monte-Cristo”, et certainement pas la dernière… Adapter une œuvre aussi emblématique que celle de Dumas n’est jamais chose facile, surtout lorsqu’il s’agit de trier les scènes essentielles et de capturer l’essence de l’histoire pour en faire un film. Dans le cas du roman de Boris Razon sorti en 2018, que je n’ai pas lu, qui raconte l’histoire d’un officier de police suivant une ancienne rock star sans téléphone ni ordinateur, l’adaptation en «Emilia Pérez» semble s’éloigner sensiblement de l’œuvre originale. Ici, le récit nous plonge dans l’univers d’un mafieux de cartel qui cherche à obtenir l’aide d’une avocate pour réaliser son souhait de devenir une femme. Cette réécriture, bien que radicale, s’avère extrêmement pertinente dans le contexte actuel, concernant une réflexion sur l’identité et la quête de soi.

Meilleur premier film

Le prix a été attribué à «Vingt Dieux» de Louise Courvoisier, l’un des rares films de la sélection que je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de voir. Ce long-métrage raconte l’histoire d’Anthony, surnommé Totone, un jeune Jurassien vivant avec son père veuf et sa petite sœur de sept ans. Mais la mort brutale de son père bouleverse son équilibre et le pousse à s’inscrire au concours du meilleur comté pour gagner de l’argent. Avec plus de 900 000 entrées en France, «Vingt Dieux» s’est imposé comme la révélation surprise de 2024.

Meilleurs décors

Le prix a été attribué à Stéphane Taillasson pour son travail remarquable sur «Le Comte de Monte-Cristo» pour la conception des décors, une récompense méritée d’autant qu’il n’a pas rencontré de concurrence téméraire cette année. «Emilia Pérez» s’est davantage appuyé sur des effets visuels pour transformer la France en Mexique, tandis que «L’Amour ouf» ne plaçait pas les décors au cœur de sa mise en scène. De leur côté, «Monsieur Aznavour» et «Sarah Bernhardt, la Divine» misaient plus sur l’incarnation de leur figure centrale que sur la mise en valeur de lieux emblématiques. Ce prix s’impose d’autant plus que les changements de décor dans «Le Comte de Monte-Cristo» jouent un rôle clé dans l’intrigue et l’évolution du personnage principal. Edmond Dantès traverse des espaces qui le changent passant d’un bateau en haute mer à une ville en effervescence, d’un paysage campagnard idyllique à une prison lugubre jusqu’à une île pleine de richesses qui l’entraînera à la vengeance et… je me retiens d’en dire plus pour ceux qui n’auraient pas encore découvert le film (s’ils existent vraiment !). Ce soin apporté aux lieux renforce l’immersion du spectateur et accompagne la transformation intérieure du héros.

Ana-Maria Vartolomei dans Le Comte de Monte-Cristo
Le Comte de Monte Cristo

Meilleur film étranger

Il est assez surprenant que l’Oscar du meilleur son ait échappé à «The Substance» ou «Les Graines du figuier sauvage» qui avaient toutes leurs chances. Cela dit, ce n’est pas la première fois qu’un choix inattendu crée la surprise : l’an dernier déjà, le film québécois «Simple comme Sylvain» avait raflé ce prix sous le nez de Christopher Nolan qui pensait se lever avec son grand «Oppenheimer». Alors, faut-il vraiment s’étonner ? Quant à «La Zone d’intérêt» de Jonathan Glazer, bien qu’il ait été une révélation de 2024 pour beaucoup (pas pour moi), sa présence dans la compétition est justifiée. Le film a accumulé les récompenses à travers le monde grâce à son sujet glaçant : l’histoire vraie d’une famille nazie vivant aux portes du camp d’Auschwitz pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais au-delà du récit, c’est surtout sa mise en scène qui intrigue. Plutôt que d’opter pour une approche classique, Jonathan Glazer (réalisateur de confession juive) a fait reconstruire une réplique de la maison des Höss, située juste à côté du camp. Il a ensuite placé des caméras Sony Venice à différents endroits de la demeure et les a laissé tourner en continu, tandis que l’équipe de production intervenait le moins possible entre les prises. Ce dispositif immersif a permis aux acteurs d’improviser et d’expérimenter sur de longues séquences, cela crée une atmosphère d’autant plus dérangeante.

Meilleurs costumes

La cérémonie a introduit cette catégorie de manière spectaculaire, avec une performance chorégraphiée où des danseuses changeaient de costumes pour illustrer l’importance du travail de création vestimentaire au cinéma. Sans surprise, ce prix revient une fois de plus à un film historique, un genre qui domine souvent cette catégorie. Cette année, c’est Thierry Delettre qui est récompensé pour son travail sur «Le Comte de Monte-Cristo». Et à juste titre : ses costumes ne se contentent pas de refléter l’époque, ils participent activement à la transformation des personnages. On retiendra notamment l’élégance des robes portées par Anaïs Demoustier, pour le raffinement du XIXe siècle, ainsi que l’évolution vestimentaire d’Edmond Dantès. Ses tenues en cuir marquent symboliquement son passage du prisonnier brisé au redoutable Comte de Monte-Cristo, imposant et mystérieux. Le costume devient ici un véritable langage visuel.

Le Comte de Monte-Cristo, scène du mariage d'Edmond Dantès
Le Comte de Monte-Cristo

Meilleur son

S’il y avait bien une récompense qu’«En Fanfare» méritait pleinement, c’était celle-ci ! Le film reposait sur une utilisation du son particulièrement subtile. Il servait de lien entre deux frères qui ne s’étaient jamais connus, tout en mettant en opposition deux univers sonores distincts : d’un côté, les cuivres vibrants et bruts de la fanfare municipale et, de l’autre, la finesse maîtrisée de l’orchestre prestigieux du personnage principal ; sans oublier ces scènes réalistes où la musique est perçue au loin, filtrée par un mur ou un espace, bien réalisées. Mais une fois encore (et, spoiler, ce n’est pas la dernière fois que je le dis), «Emilia Pérez» s’impose et balaie la concurrence. Le film de Jacques Audiard confirme son ascendant sur cette édition, et si le réalisateur est déjà largement reconnu, il faut admettre la maîtrise technique nécessaire pour mettre en scène une comédie musicale.

Révélation féminine

Bien que Mallory Wanecque (Jackie jeune dans «L’amour ouf») était très attendue en tant que favorite de cette catégorie, c’est finalement Maïwene Barthélémy qui remporte le prix pour son rôle dans «Vingt Dieux» ! Son parcours est atypique : étudiante en BTS production animale, elle n’avait pas vocation à devenir actrice et a découvert le cinéma presque par hasard. Pourtant, son interprétation semble s’imposer en grande partie parce qu’elle évolue dans un univers qu’elle connaît intimement : le milieu agricole. Cette authenticité doit transparaitre à l’écran et conférer à son personnage une vérité brute, elle n’a pas eu besoin de faire semblant. Sa performance prouve qu’un jeu sincère et enraciné dans le réel peut parfois surpasser une formation classique. Cela peut être décourageant pour quelqu’un dans le milieu du cinéma et qui tente de percer comme Mallory Wanecque depuis sa performance brute dans «Les Pires» quelques années avant. Deux belles révélations à suivre de près !

Meilleur scénario

Le prix a été attribué à Boris Lojkine et Delphine Agut pour leur travail dans «L’Histoire de Souleymane». Une décision qui me laisse mitigée : si le sujet est essentiel et mérite d’être raconté, j’ai trouvé l’intrigue particulièrement lente. À l’inverse, «Miséricorde» proposait un récit plus dynamique, rythmé par des rebondissements et une ambiguïté intrigante autour des intentions de son personnage principal. En comparaison, «L’Histoire de Souleymane» suit une narration plus linéaire, sans grandes surprises, mais son impact repose sur une dimension humaine et émotive. C’est précisément ce témoignage sincère et touchant qui a dû faire toute sa force et intéresser le public. Au-delà du film, la réalité rattrape la fiction : son acteur principal, Abou Sangaré, a lui-même traversé des épreuves similaires à celles de son personnage. Après trois refus de régularisation et une obligation de quitter le territoire, il a finalement obtenu en août 2024 un premier titre de séjour d’un an, grâce à la reconnaissance de son parcours d’intégration. Un écho troublant entre le cinéma et la vie réelle qui a peut-être poussé certains votants.

Meilleure actrice dans un second rôle

Et là, c’est le drame ! Personne ne l’avait vu venir. Si j’apprécie Nina Meurisse (notamment pour son rôle de jeune professeure d’anglais divorcée dans la série Mixte sur Amazon Prime), il faut reconnaître qu’elle n’apparaît que dans une seule scène, cela lui aura pourtant suffi pour décrocher ce prestigieux prix. Son interprétation, bien que juste, ne m’a pas particulièrement marquée, surtout face à la performance intense de son partenaire de jeu Abou Sangaré. Difficile alors de ne pas penser à Anaïs Demoustier, qui, de son côté, a porté un rôle principal dans l’univers dense et dramatique d’Alexandre Dumas. Elle a dû s’imprégner d’un personnage au passif chargé, avec une évolution complexe, ce qui demandait une implication bien plus importante. Quant à Nina Meurisse, son parcours est aussi surprenant que son sacre : elle ne se destinait pas au cinéma, ayant initialement étudié la harpe, le chant et le piano.

Meilleur film de court-métrage d’animation

Je suis ravie, car «Beurk !» de Loïc Espuche m’a offert un véritable coup de cœur (ou devrais-je dire un bisou de bonheur) pendant ces 13 minutes éclatantes de couleur rose lumineux ! En réalité, selon moi, les trois films en lice méritaient des applaudissements. «GiGi» a fait preuve d’une grande intelligence en construisant une animation riche en métaphores : la sirène vue comme une «femme à queue», symbole de la transidentité à laquelle je n’avais pas pensé, le tout intégré dans la structure d’une simple interview. De son côté, «Papillon» s’est appliqué sur ses peintures et sa thématique très sérieuse. Il s’agissait de trois propositions artistiques fortes, chacune à sa manière, mais «Beurk !» a su capturer mon enthousiasme avec une histoire simple et une énergie visuelle colorée.

Meilleur film d’animation

Pas de récompense cette année pour «La Plus Précieuse des Marchandises» de Michel Hazanavicius, malgré l’attente autour de ce film. Le prix du meilleur film d’animation revient une nouvelle fois à Flow, le chat qui n’avait pas peur de l’eau, un long-métrage sans dialogue, qui raconte l’histoire d’un petit chat noir évoluant dans un monde post-apocalyptique avec une montée des eaux inquiétante. Ce film de Gints Zilbalodis continue de récolter des distinctions après avoir triomphé aux Golden Globes 2025, aux Lumières 2025, au Festival international du film de Guadalajara 2024, et dans de nombreux autres festivals. Il est assez intéressant que presque tous les sons d’animaux viennent de vrais animaux. En France, il rencontre un véritable succès, cumule près de 250 000 entrées en seulement deux semaines et atteint les 500 000 entrées au bout de deux mois.

Meilleur acteur dans un second rôle

Alain Chabat a réussi à relever un peu l’ambiance politique et sérieuse avec un discours léger lorsqu’il a reçu le prix du meilleur acteur dans un second rôle pour son interprétation du père de Jackie dans «L’Amour Ouf». Il s’est imposé face à des performances marquantes, notamment celles de Bastien Bouillon et de Laurent Laffite dans «Le Comte de Monte-Cristo», ainsi que de Walter et l’abbé Philippe Griseul, deux rôles centraux dans «Miséricorde». Sa prestation, émotive et pleine de tendresse, incarne un père déterminé à venir en aide à sa fille, toujours en proie à un chagrin pour son premier amour. Cette victoire souligne la force de l’émotion dans un rôle secondaire, souvent perçu comme moins crucial, mais qui s’avère pourtant essentiel à la dynamique du film. Le personnage de Chabat a attiré l’attention du public avec de belles performances, notamment avec Adèle Exarchopoulos. Par ailleurs, «L’Amour Ouf» est une adaptation du roman Jackie Loves Johnser Ok? de l’écrivain irlandais Neville Thompson, publié pour la première fois en 1997. Ce projet cher à Gilles Lellouche est le fruit d’une œuvre qu’il travaille depuis qu’il avait reçu un exemplaire du livre de Benoît Poelvoorde, qui lui avait suggéré de le porter à l’écran. 

Meilleur montage

Une nouvelle victoire pour “L’Histoire de Souleymane”, qui a récolté la majorité des votes de l’Académie des César pour cette catégorie. Xavier Sirven ne se contente pas d’être monteur, il est un artiste aux multiples casquettes : réalisateur, scénariste, directeur de la photographie, ingénieur du son, monteur son, assistant monteur, et scripte. Cette polyvalence remarquable dans les métiers du cinéma lui a permis de réfléchir à chaque détail technique de ce faux documentaire. En ce sens, sa victoire n’est pas seulement celle du film, mais également de l’artisan derrière l’écran. Il a eu la capacité de toucher tous les domaines de la création cinématographique.

Souleymane (Abou Sangare), dans « L’Histoire de Souleymane », de Boris Lojkine.

Meilleurs effets visuels

En parlant de victoires récurrentes, «Emilia Pérez» remporte encore un prix, cette fois des meilleurs effets visuels ! Sa réalisation d’un Mexique recréé dans les studios de Bry-Sur-Marne en France est impressionnante et mérite amplement cette reconnaissance, notamment avec la scène marquante de Selena Gomez interprétant sa chanson «Mi camino». Cédric Fayolle, chargé de la supervision et de la production des effets visuels, a beaucoup collaboré avec le réalisateur Albert Dupontel, notamment sur «Au revoir là-haut», «Adieu les cons» ou «Second tour» ainsi que pour «Deux Moi» de Cédric Klapisch, le metteur en scène de cette cérémonie.

Meilleure musique originale

Il est courant de voir une comédie musicale remporter le prix de la meilleure musique originale, surtout dans les pays anglophones, et il était donc tout à fait prévisible qu’«Emilia Pérez» ne fasse pas exception. À la tête de la composition musicale, on retrouve Camille, la chanteuse du célèbre titre Le Festin de «Ratatouille» ainsi que des chansons du «Petit Prince», accompagnée de son compagnon Clément Ducol qui a travaillé sur des projets comme «Les Chatouilles» ou »Linda veut du poulet !». Leur collaboration a donné naissance à une bande sonore impressionnante, avec pas moins de 1h30 de musique répartie sur 43 pistes. Le couple Ducol a été très impliqué dans la création de cette œuvre, bien avant même que Jacques Audiard ait finalisé le scénario. La composition de la bande-son ne s’est pas faite uniquement en réaction au film mais a, au contraire, façonné le film dès sa conception. Cette récompense pour leur travail confirme que la musique est, à juste titre, l’un des éléments porteurs du film. Leurs chansons ne sont pas habituelles, même pour des amateurs de comédies musicales, et lui donnent un style “film d’auteur” qu’on voit rarement dans ce genre cinématographique.

Meilleure photo

Paul Guilhaume, déjà reconnu pour ses talents de directeur de la photographie, ajoute un nouveau trophée à sa collection avec «Emilia Pérez». Après avoir remporté des prix prestigieux, comme celui de la meilleure photographie pour «Ava» au festival de Stockholm en 2017 et pour le documentaire «Paradis» au prix AFC 2024, il signe ici un nouveau succès. Ce César supplémentaire vient s’ajouter aux nombreux autres obtenus par le film de Jacques Audiard, un véritable triomphe qui semble dominer cette cérémonie en termes de nombre de récompenses. Dans «Emilia Pérez», la lumière, les ombres, les couleurs et la composition visuelle en général ont été ses cartes à jouer pour capturer l’atmosphère particulière du film et ont contribué à l’émotion du spectateur.

scène de la chanson

Meilleur documentaire

Je n’ai vu que «Madame Hoffman» parmi les documentaires de la sélection cette année, donc je connais peu de choses sur les autres. «La ferme des Bertrand» se concentre sur l’histoire du monde paysan, en particulier dans une ferme de Mieussy, située à 800 m d’altitude au-dessus de la vallée du Giffre, en Haute-Savoie. Le long-métrage d’1h30 suit la vie d’une famille d’agriculteurs sur une période de 50 ans, en croisant plusieurs films documentaires pour illustrer cette longue évolution. Lors de son discours de remerciement, Gilles Perret a fait une intervention marquante en appelant à l’unité contre les extrêmes et en comparant avec les erreurs du XXe siècle.

Meilleur court-métrage documentaire 

«Les fiancées de Sud» d’Elena López Riera explore les témoignages de femmes d’âge mûr qui évoquent leurs mariages, leurs premières expériences amoureuses, et leur relation intime à la sexualité. À travers ces rites ancestraux, la réalisatrice s’interroge sur son propre parcours : son absence de mariage et d’enfants, ainsi que sur la disparition progressive d’une chaîne de relations mère-fille. Ce questionnement personnel fait écho à une réflexion plus large sur les traditions et leur évolution.

Meilleure réalisation 

Faut-il encore être surpris ?  Et l’on accueille pour sa 6e victoire… Jacques Audiard et son film «Emilia Pérez» ! Bien que le film ait suscité des débats sur les discours de son actrice principale et sur le recours aux clichés mexicains liés au narcotrafic et aux cartels, il a néanmoins séduit le public international grâce à ses performances, ses thèmes profonds, sa musicalité et sa mise en scène soignée. Ce film se distingue comme l’un des plus nommés de l’histoire des Golden Globes (dix nominations, dont quatre victoires) et des Oscars (treize nominations).

Meilleur acteur

Cette fois, la surprise a été au rendez-vous pour le public français. Beaucoup pariaient sur la prestation remarquable de Pierre Niney dans le rôle complexe d’Edmond Dantès ou sur la performance de François Civil dans «L’amour ouf» pour son rôle de Clotaire adulte. Leurs chaussettes porte-bonheur n’auront pas suffi, car le prix du meilleur acteur a été attribué à Karim Leklou, qui a livré une prestation poignante dans «Le roman de Jim». Les réalisateurs, les frères Arnaud et Jean-Marie Larrieu, ont rencontré Karim Leklou trois mois après les auditions, et après seulement dix minutes, ils ont su qu’il serait l’Aymeric idéal pour être un père de substitution qui aide sa récente petite amie enceinte d’un autre.

Karim Leklou dans le film

Meilleure actrice

Encore tourné vers une autre performance, le public s’attendait avec certitude à voir Adèle Exarchopoulos remporter la statuette dorée pour sa prestation, mais c’est finalement Hafsia Herzi qui a été récompensée pour son rôle de Mélissa dans «Borgo». Le film, inspiré d’un double assassinat survenu à l’aéroport de Bastia en 2017, relate l’implication présumée d’une surveillante de prison dans cet acte criminel. Bien que le film n’ait pas remporté le prix du meilleur scénario original, il a tout de même trouvé sa place parmi les lauréats avec cette victoire.

Meilleur film

La cérémonie se termine avec la dernière catégorie, et la question se pose : quel est votre film français préféré de l’année ? Est-il dans la liste ? Est-ce «Miséricorde», «Emilia Pérez», «Le Comte de Monte-Cristo», «L’Histoire de Souleymane» ou «En Fanfare» ? L’Académie a tranché. Et le meilleur film français de l’année est… «Emilia Pérez» ! Avec ce prix, il décroche sa septième statuette dorée lors de cette cérémonie de trois heures.

César supplémentaires

Les César d’honneur : Costa-Gravas et Julia Roberts

Le César des oubliés qui n’ont pas de César : Franck Dubosc

Le César des lycéens : Le Comte de Monte-Cristo

Conclusion

Avec des films aussi forts qui ont ramené le public en salle après une traversée du désert “COVIDienne”, les audiences ont augmenté pour cette 50e cérémonie réunissant près de 2,13 millions de téléspectateurs, contre 1,86 million de personnes lors de l’édition précédente (11,8 % de part d’audience). Le public reste globalement mitigé sur les récompenses qui n’ont pas été très réparties. Un amour pas ouf pour le Comte de Monte-Cristo qui a pourtant atteint le record de nominations aux César pour un seul film !

Les grands gagnants 

7 récompenses pour Emilia Pérez (meilleure adaptation, meilleur son, meilleurs effets visuels, meilleure musique originale, meilleure photo, meilleure réalisation et meilleur film).

4 récompenses pour l’Histoire de Souleymane (révélation masculine, meilleur scénario, meilleure actrice dans un second rôle et meilleur montage).

2 récompenses pour Le Comte de Monte-Cristo (meilleurs décors et meilleurs costumes) et Vingt-Dieux (meilleur premier film et meilleure révélation féminine).

Les grands déçus

On peut compter de nombreux films déçus alors qu’ils avaient leur chance de briller sur la scène de l’Olympia comme :

Le Comte de Monte-Cristo et ses 14 nominations pour n’en gagner que deux

«L’amour ouf» et ses 13 nominations pour n’en gagner qu’un

Sans parler de Miséricorde (8 nominations), En Fanfare (7) et Monsieur Aznavour (4) qui n’ont rien obtenu ce soir.

La note de fin peut être cette citation de Pierre Niney : “Votre réception du film (“Le Comte de Monte-Cristo” est et restera notre plus grande récompense à vie”. Et vous ? Etes-vous satisfaits des récompenses de cette année ?

Dans cette même branche, je vous invite à lire “Le radar des sorties cinéma : les films les plus attendus de 2025“, peut-être que certains seront récompensés, qui sait ?