group of multiethnic people gathering around female speaker in studio
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L’abstention serait elle devenue le premier parti de la jeunesse française ?

Nous nous sommes interrogés sur la réelle signification du vote pour les jeunes citoyens ? Pourquoi ne votent ils pas ? Qu’attendent-ils de l’action politique ? Croient ils toujours en notre système démocratique .

Nous nous sommes interrogés sur la réelle signification du vote pour les jeunes citoyens ? Pourquoi ne votent ils pas ? Qu’attendent-ils de l’action politique ? Croient ils toujours en notre système démocratique .

Alexis de Tocqueville, penseur et philosophe du XIX e siècle, avait eu le génie d’anticipé l’avenir politique de l’humanité dans son œuvre ” De la démocratie en Amérique ” , un incontournable de la géopolitique que je vous invite d’ailleurs grandement à lire. Il y avait notamment prédit le désintérêt progressif du peuple pour la chose publique en démocratie, chose qui a priori semble se confirmer plus que jamais sous la Cinquième République française à travers l’abstention.

En 2019, le taux d’abstention aux Européenne s’élevait à 49.9 % , plus récemment les élections législatives de 2022 on connue un taux d’abstention de 53.77 % aux 2d tour, mais le taux de participation a l’élection présidentielle reste le plus préoccupant. Bien que les électeurs se mobilisent plus pour cette dernière que pour les autres, on observent depuis 2007 une hausses du taux d’abstention : aux 2d tours de 2007, c’est 16.03 % des électeurs qui ne s’étaient pas déplacé, puis 19.66 % en 2012, 25.4 % en 2017 et enfin, ils étaient 28 % . Ce second tour de la présidentielle 2022 a surtout remis en lumière la désaffection des jeunes pour le vote. Forcé de constaté que les 18-34 ans sont les grands absents de cette élection, d’abord les 25-34 ans au premier tour puis les 18-24 ans au second puisque 41 % d’entre eux n’ont pas étaient aux urnes selon les estimations Ipsos-Sopra SteSte. . Nous avons donc essayé de comprendre comment l’abstentionnisme est devenu le 1er parti des jeunes en France. 

66 % des jeunes se sentent oubliés par les politiques et déplorent le manque de représentation de leur préoccupation dans le débat public.

Sondage Ipsos-Sopra Steria pour la Fédération des associations étudiantes (Fage )

Quelles sont donc ces préoccupations ?


Nous vous partageons le top 5 des sujets d’inquiétude des 18-30 ans, d’après une nouvelle étude, relayée par Le Parisien le mercredi 23 février dernier.

  1. Le pouvoir d’achat : La crise sanitaire a rendu la vie étudiante de plus en plus pénible, difficulté a trouvé un emploie, isolement, fracture numérique et bien d’autres problématiques auxquels doivent faire face les étudiants et l’inflation n’a fait que les exposer un peu plus a la précarité , 58 % disent avoir « rencontré des difficultés financières pour manger sainement » depuis un an .
  2. La question environnementale : Alors que le réchauffement climatique, bouleverse l’équilibre naturel et menace l’avenir, 15 % des jeunes sondés déclarent que les questions du climat et du développement durable font partie de leurs priorités.
  3. Viens ensuite en 3, la santé, pour 10 % des sondés : Avec la crise sanitaire, la santé psychologique des jeunes a été fragilisée, l’assistance d’un psychologue se révèle être un besoin élémentaire. 1 jeune sur 4 présente « une suspicion de trouble de l’anxiété générale ».
  4.  En 4e position au même niveau : les inégalités sociales et l’insécurité, avec la même proportion de 8 %
  5. Le thème de l’immigration lui, bien qu’il soit omniprésent sur la scène médiatique préoccupe bien moins les jeunes puisque seulement 6 % des sondés déclarent en faire une priorité.

Une école qui ne sensibilise pas suffisamment a la politique

On retrouve également chez certains jeunes l’idée qu’ils sont justement « trop jeunes », « trop peu expérimentés » ». Ils pensent ne pas posséder les connaissances suffisantes quant aux enjeux politiques et aux programmes des différents candidats, les questions économiques touchantes a la dette de l’état ou le financement des propositions par exemples leur semble parfois hors de portée. De ce fait, ils sont beaucoup sujets à la démagogie. C’est ici évidemment la question du rôle de l’état et de l’éducation national qui se pose, l’école ne devrait-elle pas dispenser aux citoyens en devenir une réelle formation à la citoyenneté et a ce que celle-ci implique comme devoirs dans une démocratie ? Au fonctionnement des institutions politiques, à leurs créations ? Et à l’utilité et l’importance du vote ?

Une pratique révélatrice de profondes fractures territoriales

L’abstention possède aussi ses réservoirs de vote qu’on retrouve principalement, dans les zones rurales, les quartiers difficiles et les Outre-mer où on note une véritable fracture avec la politique et celle-ci se.
Creuse au fil des années. Ces territoires sont devenus les zones de confort de l’abstention, les habitants y appliquent le plus souvent une logique collective d’abstention, motivée par un sentiment d’exclusion et de lassitude, mais aussi du a leur condition sociale. Nous avons donc donné la parole à un jeune citoyen du département de la Seine-Saint-Denis qui a atteint un record en métropole avec un taux d’abstention de 63.39 %.

Nous sommes donc allés à la rencontre de Kevin, jeune ambulancier de 23 ans. Fils d’ouvrier issu de l’immigration, il est diplômé du baccalauréat et a grandi dans une banlieue difficile en Seine-Saint-Denis. Indifférent a la politique, il se définit comme « apolitique » et déclare « ne jamais avoir voté et ne pas compter le faire un jour » , le vote est pour lui un droit au même titre que l’abstention qui lui permet d’exprimer sa désapprobation au système actuel. Interrogé sur les raisons de son abstention, il explique ne pas désirer apporter son soutien ni favoriser un candidat ou un partis par qui il ne se sent pas représenté et martèle « m’abstenir, c’est montrer mon indifférence vis-à-vis de la politique et ne pas accepter de choisir le moins pire ». Ses parents en raison d’un très faible niveau d’éducation et ne parlant pratiquement pas français ne votaient pas non plus et dans son quartier, on ne parlait pas forcément politique. En effet, depuis qu’il a eu le droit de vote il y a 5 ans jusqu’à maintenant, il n’a jamais voté, car il n’a pas confiance en « des hommes politiques pour la plupart déconnectée des réalités » . Il explique les raisons de cette décision radicale « En banlieues, on a toujours été oublié par l’état, les politiques et nous, on n’est pas dans le même monde et nos problèmes du quotidien ne les intéressent pas » il n’a jamais pris connaissance des programmes des candidats et confie « Pourquoi perdre mon temps à lire des gros blocs de papiers remplis de thermes incompréhensibles et de promesses qui ne seront jamais tenues » .

Cet  entretient est très révélateur d’une triste réalité sociologique : les personnes issues de milieux précaires avec un capital culturel et économique faible, ayant évolué dans un entourage peu ou pas politisé réunissent malheureusement toutes les prédispositions à l’abstention. Ainsi, le fait de bouder les urnes devient donc presque une habitude dans certains territoires par exemple en Outre-mer, Saint-Barthélemy est le département où on a le moins voté au second tour, avec 75,44 % d’abstention.

Un acte de protestation

Aussi marqueur de protestation contre le système et les partis traditionnels dans lesquels les jeunes ne se reconnaissent pas ou plus, l’abstention, c’est aussi le signe d’une véritable désaffiliation politique. Les jeunes ont du mal à se définir politiquement, ce qui marque une fracture avec les anciennes générations qui avaient le réflexe de « voter quasi-mécaniquement  » et qui était encré dans des partis croyant en la capacité du politique à changer les choses. Le manque de renouvellement dans l’offre électorale contribue à une certaine exaspération, qu’on constate dans les témoignages recueillis par l’enquête de France info ” chronique génération 2022″ . Les jeunes électeurs disent regretter de devoir choisir chaque année entre les mêmes candidats, comme Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen qui se présentaient respectivement pour la 3e fois. De plus, la défiance qu’ils cultivent envers les politiques est aussi alimentée par la tournure que les élections prennent ces dernières années, les débats deviennent des clashs et on assiste à la course au Buzz et aux likes que les candidats cherchent à obtenir grâce à des propos des plus en plus outrageants.

L’action politique ? Oui, mais sous de nouvelles formes

Les jeunes n’abandonnent pas pour autant l’action politique, ils n’ont même jamais été aussi engagés ! Néanmoins, ils mènent ces actions à leur manière indépendamment des partis. Ils font de la politique à leur échelle, au niveau local, à travers des associations étudiantes, des marches pour le climat, ils s’emparent des sujets sociétaux de leur temps (droits des femmes, environnement etc. …) avec les outils qui sont les leurs (réseaux sociaux, web, etc.) . L’abstention n’est donc pas totalement le symbole d’un désintérêt de la part des jeunes pour la politique, mais plutôt le signe qu’ils ne semblent plus voir dans le système représentatif l’expression démocratique. 


Toutefois, cette analyse est à nuancer puisqu’on assiste ces dernières années à un réel rajeunissement de la classe politique française. Un parti des jeunes continuent de s’impliquer dans les partis politiques pour y défendre leurs convictions et conservent l’idée que c’est de l’intérieur qu’il faut de changer les choses. En 2017 ce rajeunissement a frappé au plus haut de l’échelle politique avec l’élection du plus jeune président de la République depuis Napoléon Bonaparte : Emmanuel Macron ,puis aux dernières législatives, c’est Tematai Le Gayic, qui a été élu a 21 ans le plus jeune député de l’histoire de la République française.

En somme , plus que le signe d’une simple passivité des jeunes , plus qu’un simple phénomène de rébellion , l’abstention est un véritable mal qui s’étend chez les jeunes et remet en cause le système de notre état démocratique . Le constat est clair la jeunesse a choisit d’agir autrement qu’a travers le vote . Alors comment ne pas s’interroger sur la légitimité d’une élection a laquelle 41% de la jeunesse n’a pas pris part . Remettant en cause le système et la démocratie représentative l’abstention pointe aussi les carences de l’état dans certains territoires de la République , et appelle également à réfléchir quant a l’efficacité de l’école de la république dans la formation des citoyen(nes) . Toutefois la politique traditionnelle et ses partis compte encore de fervents défenseurs dans la jeunesse ce qui appelle a rester optimiste .