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Comprendre les lois anti-IVG aux Etats-unis

Il y a un demi-siècle, la Cour Suprême promulguait l'arrêt Roe v. Wade, autorisant l'avortement sur tout le territoire. Pourtant, la plus haute juridiction du pays est revenue sur sa décision le 24 juin 2022 : comment expliquer un tel revirement de situation ?

Il y a un demi-siècle, la Cour Suprême promulguait l'arrêt Roe v. Wade, autorisant l'avortement sur tout le territoire. Pourtant, la plus haute juridiction du pays est revenue sur sa décision le 24 juin 2022 : comment expliquer un tel revirement de situation ?

Il y a un demi-siècle, la Cour Suprême promulguait l’arrêt Roe v. Wade, autorisant l’avortement sur tout le territoire. Pourtant, la plus haute juridiction du pays est revenue sur sa décision le 24 juin 2022 : comment expliquer un tel revirement de situation ?

Le système politique aux USA

Aux USA, les pouvoirs sont répartis de la manière suivante : le Congrès, composé du Sénat et de la Chambre des représentant, est à la tête de la branche législative. Sa principale fonction est d’élaborer et voter les lois fédérales. Le président détient le pouvoir exécutif et enfin la Cour Suprême est en charge du pouvoir judiciaire : elle s’assure du respect de la Constitution, dont elle est seule interprète. Elle est donc en capacité de rejeter des lois qu’elle juge inconstitutionnelles, aussi bien à l’échelle étatique que fédérale.

Elle tranche certains sujets de société, comme le mariage pour tous ou encore l’IVG. Le président n’a pas son mot à dire étant donné qu’il s’agit de la juridiction la plus élevée des Etats-Unis, son droit de veto ne s’applique qu’aux lois proposées par le Congrès. Fondée en 1789 par Georges Washington, elle est actuellement composée de 9 membres, chacun nommé à vie par le président et approuvé aux 3/5e par le Sénat.

Lors du mandat de D. Trump, plusieurs juges sont remplacés. En 2017, Mitch McConnell, député républicain, fait voter l’abolition de cette majorité qualifiée, permettant l’arrivée à la Cour du conservateur Neil Gorsuch. A. Kennedy, juge aux positions centristes (il s’était notamment montré favorable aux lois sur l’homosexualité), décide de prendre sa retraite. Pour le remplacer, le président nomme Brett Kavanaugh, un nouveau conservateur. Enfin en 2020, Amy Coney Barret, une ancienne juriste de droite, vient remplacer Ruth Bader Ginsburg, une icône de la gauche américaine, morte en fonction. B. Obama lui avait d’ailleurs proposé de démissionner pour nommer à sa place un autre juge libéral, en meilleure forme, et éviter cette situation où la majorité serait républicaine.

Roe v. Wade

L’arrêt Roe v. Wade est né de l’affaire suivante : Norma McCorvey, plus connue sous le nom de Jane Roe remet en cause la loi du Texas, interdisant l’avortement. Elle perd son procès face au procureur Henry Wade. Cependant l’avocate de la jeune femme ayant fait appel, l’affaire se retrouve entre les mains de la Cour Suprême. En 1973, le jugement est rendu, en faveur de Jane Roe.

Cette décision historique marque un tournant : l’arrêt Roe v. Wade est prononcé et l’IVG est rendue légale (jusqu’à 22-24 semaines de grossesse) au niveau fédéral. Cette délibération divise profondément la population en 2 camps. D’un côté, il y a les « pro-life », anti-avortements, souvent de fervents croyants pour qui ce fœtus est une bénédiction de dieu qu’il faut protéger. Par exemple Jane Roe aujourd’hui s’est convertie au christianisme et lutte contre l’IVG. De l’autre, les « pro-choice » s’approprient le célèbre slogan « my body, my choice » et défendent la pratique, l’égalité homme-femme, la liberté de disposer de son corps et le respect de la vie privée d’autrui.

Division des américains

Une affaire remise sur le tapis

En 2021 le Mississipi demande à la Cour Suprême de revoir le texte légalisant l’avortement, ravivant la querelle entre les 2 camps. Malgré les espérances de B. Obama, la Cour Suprême comptait une majorité de membres conservateurs, 5 précisément (dont 3 nommés par Trump) : Samuel A. Alito, Amy Coney Barrett, Neil M. Gorsuch, Brett M. Kavanaugh, Clarence Thomas, ayant tous voté pour la révocation de l’arrêt Roe v. Wade. 3 juges progressistes se sont tout de même opposés à cette idée : Sonia Sotomayor, Elena Kagan et Stephen Breyer. Ce dernier, aujourd’hui retraité, a laissé sa place à Ketanji Brown Jackson, nommé par J. Biden mais ne renversera pas le déséquilibre entre conservateurs et libéraux.

L’arrêt Roe v. Wade est aujourd’hui annulé, chaque Etat est donc libre d’interdire, d’autoriser ou de réguler l’accès à l’avortement comme il l’entend.

Vers une réduction des libertés ?

Le Missouri fut le premier Etat à le rendre illégal, le 24 juin 2022, le jour même où la décision a été rendue. 12 autres Etats avaient déjà prévu des lois, interdisant formellement cette pratique dès le jugement prononcé. La dernière clinique pratiquant l’avortement, nommée la « Maison rose », fermait ses portes le 6 juillet. Le droit à l’IVG pourrait être fortement menacé dans la moitié des Etats-Unis.

Cette décision de la Cour Suprême suscite de nombreuses inquiétudes chez les habitants qui craignent une remise en cause de leurs droits fondamentaux. Clarence Thomas a lui-même annoncé qu’il faudrait revoir d’autres arrêts comme ceux concernant la contraception ou le mariage pour tous. Des manifestations, des mobilisations ont alors lieu dans tout le pays et même de l’autre côté de l’océan.

Rien n’est jamais définitivement acquis. Il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. 

Simone de Beauvoir